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Mobilisation des agriculteurs : 91 personnes interpellées après une intrusion dans l’enceinte du marché de Rungis

C’est la première fois que les autorités haussent réellement le ton depuis le début de la mobilisation des agriculteurs. Au total, 91 personnes ont été interpellées, mercredi 31 janvier, après une intrusion dans des entrepôts du marché international de Rungis (Val-de-Marne), au sud de Paris.
Une « ligne rouge a été franchie » avec cette « tentative d’intrusion », qui a été « rapidement déjouée » par les forces de l’ordre, a déclaré le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, lors d’une conférence de presse. Les 91 personnes interpellées « vont être placées en garde à vue », a poursuivi M. Nuñez. Un précédent bilan du parquet de Créteil faisait état de 79 personnes en garde à vue « pour dégradation du bien d’autrui en réunion et participation à un groupement formé en vue de la préparation de dégradations de bien ».
Des personnes « à pied sont entrées brièvement sur une zone de stockage » du marché en fin d’après-midi et y ont « commis des dégradations », a expliqué à l’Agence France-Presse (AFP) une source policière. Elles ont été « sorties des lieux par les forces de l’ordre », a-t-elle ajouté, précisant que plus personne ne se trouvait à l’intérieur du site. « Nous ne tolérerons aucun trouble à l’ordre public », a affirmé M. Nuñez, tout en assurant : « Le mouvement globalement se passe très bien. »
Ces interpellations s’ajoutent au placement en garde à vue, plus tôt dans la journée, de quinze autres personnes, arrêtées près de Rungis (Val-de-Marne). Leur garde à vue a été levée mercredi soir après leur audition, a fait savoir le parquet de Créteil. « Une décision sera prise ultérieurement après examen de la procédure », a ajouté le ministère public.
Vers 16 h 50, plusieurs dizaines d’agriculteurs, parmi lesquels des membres de la Coordination rurale de Lot-et-Garonne, sont arrivés devant des entrepôts en lisière du marché de Rungis, avait constaté un journaliste de l’AFP. « Nous avions décidé d’investir Rungis, nous avons investi Rungis », s’est félicité Serge Bousquet-Cassagne, président de la chambre d’agriculture de Lot-et-Garonne, qui menait le cortège. Au moins cinq manifestants sont entrés dans un bâtiment puis en sont ressortis, sans violence, escortés par les forces de l’ordre, selon le journaliste de l’AFP présent sur place. Interpellés, certains sont montés dans les camions des forces de l’ordre, et une nasse s’est formée, tandis que Serge Bousquet-Cassagne leur demandait de « rester tranquilles » et de ne « pas avoir peur ».
« Vous ne risquez rien et vous le savez », a-t-il lancé à ses troupes massées devant les bâtiments gris. « On n’a rien dégradé ! », a répété le responsable devant les journalistes présents. « Maintenant, ils nous encerclent, c’est le travail normal des forces de l’ordre, et nous, parce qu’on est des républicains, des agriculteurs responsables, tous des pères et des mères de famille, ici, on ne va pas risquer [de] se bagarrer pour rien », avait-il déclaré à l’AFP avant les interpellations.
Une autre partie du convoi venu du Sud-Ouest à destination de Rungis a été bloquée par les forces de l’ordre dans le Loiret. Les agriculteurs ont décidé d’y passer la nuit. « On reste là ce soir. On attend de voir ce qu’ils vont faire de nos gars en garde à vue (…). On verra demain matin ce qu’on fait », a déclaré Jean-Pierre Labeau, de la Coordination rurale.
Au Sénat, le patron du premier syndicat agricole, la FNSEA, Arnaud Rousseau, a appelé « au calme et à la raison » les agriculteurs français, dont « l’attente est énorme », « avec évidemment (…) des sujets qui ne se règlent pas en trois jours ». Mais, faute de réponses « en profondeur », le Salon de l’agriculture, à la fin de février, ne sera pas « une visite de santé » pour les politiques, a-t-il prévenu. Son syndicat s’était démarqué de la Coordination rurale en rejetant l’idée d’un « coup de force à Rungis ».
Les aides dégagées mercredi par l’exécutif français et les concessions de l’Union européenne (UE) sur les jachères et les importations ukrainiennes ne semblent pas trouver grâce aux yeux de la profession, également mobilisée en Italie, en Espagne et en Allemagne.
En plus des fonds d’urgence déjà annoncés pour les éleveurs bovins, le bio ou les exploitants touchés par la tempête Ciaran, 80 millions d’euros d’aides seront attribués aux viticulteurs en difficulté, a annoncé le ministre de l’agriculture, Marc Fesneau. A Bruxelles, dans la soirée, il a appelé la Commission à « simplifier » rapidement les procédures de la politique agricole commune (PAC), réclamant des « choses très concrètes » et promettant des propositions avec d’autres Etats membres.
A la veille du sommet européen prévu jeudi 1er février, des agriculteurs français et belges ont bloqué « ensemble » un point de passage à la frontière entre les deux pays, dénonçant « la distorsion de concurrence » entérinée par les accords de libre-échange, et disant attendre « des annonces très fortes ».
Signe d’intenses tractations en coulisses, le premier ministre, Gabriel Attal, a reçu, mercredi, des responsables de la Coordination rurale et de la Confédération paysanne, après ceux de la FNSEA et des Jeunes Agriculteurs, lundi et mardi.
Le Monde avec AFP
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